Les montagnes russes émotionnelles. Warren Barguil est aujourd’hui passé à moins d’un centimètre de sa première victoire sur le Tour de France. Il a cru quelques longues minutes avoir course gagnée avant que ce rêve ne s’effondre.

Cruelle photo-finish

« Je le passe sur la ligne, je le passe sur la ligne ! Je pense, j’espère… J’ai vu Rigo (Rigoberto Uran, NDLR), il avait l’air déçu. » Warren Barguil s’enflammait à l’arrivée au micro de France Télévisions. En pleurs depuis cinq minutes, le Français criait victoire. Une seconde plus tard, le visage fermé, le Breton comprenait qu’il avait perdu d’un rien, battu par le Colombien Rigoberto Uran. « C’est comme ça. Je pensais l’avoir passé… Je pense vraiment l’avoir passé sur la ligne… » Les larmes de joie avaient cessé de couler sur le visage juvénile du grimpeur de la Sunweb.

Le Sud-américain a connu un sentiment à l’exact opposé aujourd’hui : « J’étais convaincu que Barguil avait gagné », avouait Uran la ligne franchie. Puis il a su que c’était lui, qu’il avait pris sa revanche sur cette maudite étape de la Vuelta 2013 que le jeune tricolore lui avait soufflée à la photo finish, là aussi. « J’aurais peut-être préféré faire deux à la Vuelta et gagner aujourd’hui… » regrettait Warren Barguil, amer. J’avais besoin de cette victoire en ce moment, je reviens de loin. Pour quelques mètres, ça le faisait… » Malgré la désillusion, le Français s’est et a rassuré, son talent n’a pas disparu.

« J’en ai beaucoup trop fait, ça m’a coûté sur la fin. J’étais un peu trop actif. J’avais de très bonnes jambes et quand on a de trop bonnes jambes on ne calcule pas. J’ai couru un peu comme un idiot », déclarait le Breton hier. Aujourd’hui, il s’est montré beaucoup plus satisfait de lui-même : « Je n’ai pas répété l’erreur d’hier, j’ai couru à la perfection. Je suis frustré mais j’ai bien géré mon sprint, j’attends peut-être une demi seconde de trop. C’est le vélo, c’est dur parfois. »

Maillot à pois en puissance

Cruel et à la fois magnifique, le Tour de France offre un superbe lot de consolation au Breton. La tunique du meilleur grimpeur, qu’il chipe à son compatriote Lilian Calmejane. « J’ai fait une bonne opération pour les pois. Les autres ont douté de ma volonté car je ne jouais pas les points au début. J’attendais juste les hors-catégories. » La chasse aux pois a été fructueuse, et Barguil détient deux fois plus de points que son premier poursuivant, Primoz Roglic (60 à 30). Barguil aura désormais à cœur de conserver ce paletot. Il le peut tant ses qualités de grimpeur ont éclaboussé le Mont du Chat aujourd’hui.

Lancé à l’assaut du col jurassien avec une minute trente d’avance au pied, il a terminé la montée en conservant trente secondes. Pour un homme seul, dans l’échappée deux jours de suite et poursuivi par un groupe de favoris en pleine explication, la performance est belle. La journée de repos va faire du bien, mais le Breton est déjà prêt à repartir devant, pour défendre son maillot et aller chercher, enfin, cette première victoire sur la Grande Boucle. « Je réessayerai, c’est sûr », confiait-il en tout cas.

Une chose est également certaine ce soir, Warren Barguil a retrouvé son meilleur niveau. Contraint à l’abandon en Romandie pendant le mois d’avril, il souffrait d’un trait de fracture de l’os iliaque au niveau du bassin et n’était alors pas convaincu de pouvoir courir sur les routes de l’Hexagone. Trois mois plus tard, il passe à un boyau de la plus belle victoire de sa carrière. Alors qui sait, dans deux semaines, Barguil pourrait monter sur le podium à Paris habillé de pois et auréolé d’un succès de poids. Ce serait mérité.

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