Le cyclisme est un grand livre plein d’Histoire et d’histoires. Aujourd’hui, Alberto Contador en a écrit une nouvelle page, dont il vient clore le chapitre qui était le sien. Une dernière fois, un dernier coup de pistolet a retenti alors qu’il franchissait la ligne en vainqueur.

Un épilogue heureux

L’Histoire de notre sport est grande. Si bien que, des décennies plus tard, les amoureux de la petite reine se souviennent, ou ont appris, les exploits de Coppi, Merckx ou Hinault. Entre envolées montagneuses, échappées solitaires ou maîtrise du suspense, bien de l’encre a coulé à la suite d’étapes restées mythiques. Il ne fait aucun doute que la journée qui s’achève, du côté des Asturies, aura droit au même sort. L’histoire du jour n’aurait pas pu être plus belle. Depuis un peu plus d’un mois, tout le monde savait que l’Angliru allait être la dernière ascension gravie en course par Alberto Contador, son ultime arrivée au sommet et sa chance finale de lever les bras. Un scénario rêvé. Mais bien souvent dans le vélo, rien ne se passe comme prévu. Le Pistolero n’avait sûrement pas planifié de perdre plus de deux minutes trente dès la troisième étape de cette Vuelta. Malade ce jour-là, l’Espagnol a par la suite cherché à rebondir à chaque occasion, se dressant sur ses pédales pour défier ses adversaires dès que la route se cabrait.

Le multiple vainqueur de grands tours a essayé maintes fois, et s’il a réussi à se rapprocher de la tête du classement général, jamais, sauf cette semaine vers Los Machucos, il n’a pu batailler de près pour une victoire d’étape. Pourtant, en ce jour de dernière chance, quelque chose nous disait que l’Histoire allait pencher de son côté. Les Trek-Segafredo ont tout fait pour que l’échappée ne prenne pas le large, n’en déplaise à Romain Bardet qui aura eu le mérite d’essayer trois semaines durant. Les hommes de tête à portée de pistolet, Contador a cette fois fait le choix de l’attaque en descente. Epaulé par son équipier Pantano, puis dans les premières rampes de l’Angliru par son compatriote Enric Mas – ancien membre de la Fundacion Alberto Contador -, le natif de Pinto s’est ensuite envolé comme à ses plus belles heures, les bras tendus sur ses cocottes. Et même si Froome maintint un temps le suspense dans les derniers hectomètres, même si l’Espagnol manque le podium pour vingt secondes, difficile de rêver meilleure fin de carrière.

La marque d’un grand

Les champions veulent partir au top. C’est cet état d’esprit qui a poussé Bernard Hinault à prendre sa retraite en 1986, quelques mois après sa deuxième place sur le Tour. C’est aussi ce que voulait rappeler Contador à tout le monde aujourd’hui. Moins dominateur depuis son Giro victorieux il y a deux saisons, chacun s’amusait à le lui rappeler. Lui répondait par des offensives toujours plus nombreuses, toujours plus lointaines et toujours plus spectaculaires. Car si les vainqueurs écrivent chacun leurs histoires, l’Histoire retient quant à elle autre chose.

Elle préfère s’attarder sur un cyclisme de prise de risques, d’exploits, d’attaques et de spectacle, devenu de plus en plus rare de nos jours. Et quoi que l’on puisse penser d’Alberto Contador, de sa carrière et de ses succès, il animait toujours la course. Imaginez l’ennui s’il n’avait pas été présent au départ de cette Vuelta. Assurément, ce champion va nous manquer. Mais quel beau souvenir d’avoir vécu sa dernière journée de montagne avec lui, de l’avoir accompagné jusqu’au sommet de l’Angliru, en grimaçant avec lui à chaque sortie d’épingle, s’accrochant à un guidon invisible pour le pousser encore plus haut. Des émotions que seuls les grands peuvent procurer.

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