L’ensemble de la rédaction de Chronique du Vélo a fait ses pronostics en vue du Tour. Nous avons chacun livré notre top 10, notre maillot vert et notre maillot à pois pour finalement établir notre propre classement. Jusqu’à la veille du départ, nous allons donc vous présenter ces protagonistes via des portraits décalés. Le but : vous faire redécouvrir ces champions dont on parle déjà tout au long de l’année. À la deuxième place, Alberto Contador.

Il a connu la grâce et la disgrâce. La glorification et l’humiliation. La vie, surtout, et la mort, une fois. Entre ces deux extrêmes, Alberto Contador n’a tenu qu’une seule ligne : se battre jusqu’au bout. Alors qu’importe les vents, qu’importe les marées, l’Espagnol partira à la conquête d’un nouveau Tour de France tant que ses jambes le lui permettent.

En quête d’un happy end

Dans une réalité alternative, Alberto Contador ne fait plus partie du peloton professionnel, et c’est fort dommage. Dans ce miroir de notre monde, l’Espagnol a tenu sa parole et il a pris sa retraite au terme de la saison 2016. Année pendant laquelle il a posé le pied sur le Port del Canto, incapable de tenir la cadence du Tour de France. Année pendant laquelle il est reparti de la Vuelta sans la moindre victoire, une première dans sa riche carrière. On ne sait pas trop ce qu’il est devenu. La rumeur veut qu’il se soit réfugié dans les Canaries avec sa femme Macarena. Quelques photos postées sur les réseaux sociaux par des touristes viennent donner crédit à ce bruit.

Si tout le milieu a rendu hommage à ce brillant champion, faisant partie du pinacle des coureurs capables de remporter les trois grands tours, d’autres ont eu l’outrecuidance d’affirmer que le Pistolero n’était que l’ombre de lui même à la fin de sa carrière. Ne parlons même pas du volubile Oleg Tinkov. Le richissime russe n’a pas souhaité organiser de fête pour célébrer le départ du Madrilène. Pire encore, il n’a pas voulu l’inviter au traditionnel rendez-vous de fin de saison. À la place, il s’est contenté d’une déclaration fracassante dont il a le secret: « Contador est un Espagnol de merde, il ne gagnera jamais rien. Il est trop vieux et trop méchant. Son régime l’a rendu fou et cupide. »

Un mental d’acier

L’histoire aurait pu être vraie, si ce n’est qu’il n’y a rien dans le tempérament d’Alberto Contador qui aurait justifié qu’il tienne cette promesse glissée entre deux interviews. Une promesse donnée est qu’une entrave à celui qui l’a faite dit le proverbe. L’échéance 2016 n’avait de sens que s’il avait signé un doublé Tour-Vuelta. Ainsi, il aurait quitté le cyclisme pro comme un géant. « L’Espagnol de merde » est orgueilleux, on ne peut le lui reprocher vu l’ampleur de son palmarès. Partir sur un exercice décevant, c’était hors de question. « Tant que j’aurai des chances de gagner sur les Grands Tours, je peux envisager de continuer, déclarait-il en janvier. Et quand je n’aurai plus cette possibilité, ce sera le moment de raccrocher mon vélo. »

Pour mettre à mal les ambitions d’Alberto Contador, il faut plus que des déconvenues sportives ou des insultes d’un sponsor exigeant. L’homme a déjà connu pire, et pourtant il a tout encaissé. « C’est le coureur le plus fort mentalement que j’aie jamais connu, disait de lui son ancien équipier Dani Navarro. Il a un don unique qui fait que lorsqu’il est mal, qu’il souffre, rien ne transpire. Il est capable de repousser la souffrance au-delà des limites classiques. » La carrière de Contador est jalonnée d’épreuves qu’il a toujours surmonté avec brio car comme le dit sa mère Paquita : « Ce qui le caractérise, c’est l’envie, la force de volonté. »

Des marques indélébiles

Contador n’est pas du genre à se débiner sous la pression. En 2011, il doit courir avec une épée de Damoclès au dessus de la tête à cause de son contrôle positif au clenbutérol – pour lequel il sera suspendu 2 ans l’année suivante. Le Madrilène est conspué par le public, harcelé par les journalistes, mais il laisse passer l’orage et fait sa saison comme si de rien n’était. Il a un peu d’expérience dans le domaine. Dès ses premières années en pro, il est cité (puis blanchi) dans l’affaire Puerto. Sa domination sur le cyclisme mondial dans les années qui ont suivies avait alors suscité la méfiance des chantres de l’anti-dopage. Sa suspension a au moins eu le mérite de clore le chapitre sans pour autant compromettre sa carrière, relancée de la meilleure des manières avec une Vuelta un mois après son retour dans le peloton.

Mais si les chutes, les scandales ou les critiques semblent si peu l’atteindre, c’est parce qu’elles sont bien dérisoires par rapport aux souffrances endurées par Contador en 2004. Début de rupture d’anévrisme en pleine course, œdème cérébral pendant sa convalescence, la Madrilène a failli tout perdre en l’espace d’une opération risquée. De son propre aveu, il a vu la mort de près en cet instant. Il s’en tire à bon compte avec des plaques de titane et des points de suture dans le crâne. Là encore, l’orgueil du champion lui a permis de gagner une course un mois après son retour sur un vélo.

Après tout ceci, vous vous doutez bien que l’âge n’est même pas un argument pour faire taire le Pistolero. « S’ils disent que vieillir rend la victoire sur le Tour de France plus difficile, cela me motive encore plus pour le faire », assurait-il en début de saison. Dix ans après son premier sacre sur la Grande Boucle, l’Espagnol de 34 ans fera tout pour mener la vie dure à ses rivaux et s’offrir la troisième victoire qu’on lui avait retiré. Histoire de faire taire les plus médisants de ce monde, et partir au sommet de sa légende.

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