Insolent de facilité lors du sprint final de Paris-Camembert, l’un des meilleurs sprinteurs français du moment ne s’est pas fait prier pour ajouter une nouvelle victoire à son palmarès. L’un des porte-drapeau de cette nouvelle génération dorée aux côtés d’Arnaud Démare ou Nacer Bouhanni a accepté de faire le point avec la Chronique du Vélo sur ses motivations futures, et notamment sur la fin d’un mois d’avril qui s’annonce comme charnière. Un entretien sincère, qui traduit les velléités ambitieuses, mais réalistes de l’un des plus grands espoirs du cyclisme tricolore.

« Gagner des courses avant tout »

Déjà vainqueur à quatre reprises depuis le début de la saison, le lutin de poche de l’équipe Europcar s’est immédiatement engouffré dans la spirale positive d’une année 2014 qui semble être dans la lignée d’un cru 2013 déjà de qualité. Celui qui s’était affirmé comme un sprinteur des plus costauds durant ses années passées au sein des catégories de jeunes s’est développé au point de concurrencer les meilleurs passe-partout du peloton. John Degenkolb, terrassé par le Français à l’occasion d’un final sur le Mur de Laudun lors de l’Etoile de Bessèges, en a fait les frais. Un tableau de chasse déjà enviable pour une deuxième saison professionnelle, qui se doit d’être encore élargi. Quelque peu discret sur le Circuit de la Sarthe, le 75ème Paris-Camembert lui convenait à ravir, avec un final corsé mais pas non plus insurmontable, comme il le concédait au départ. « C’est sûr que j’aimerais bien remporter Camembert, c’est une course qui me plaît, je n’étais pas passé loin l’an dernier en terminant cinquième. Je me sens en bonne condition. » Si le natif de Saint-Nazaire reste une nouvelle fois humble, il ne cache pas ses ambitions, qui collent à celle d’une équipe Europcar des plus soudées derrière un coureur de caractère, assumant sans complexe son rôle de leader. « L’objectif, c’est de gagner, gagner des courses avant tout, toutes celles auxquelles on participe. On ne va pas se le cacher », lâche l’intéressé. Malgré son allure de jeune et timide étudiant, le protégé de Jean-René Bernaudeau a su mener sa barque durant les premiers mois de 2014, et a construit un programme de courses qui semble adapté à sa progression constante. Et si son appétit vorace pour la Coupe de France demeure, l’envergure qu’il prend l’amènera inéluctablement et très rapidement vers des courses plus huppées.

Cependant, pas question de parler d’échec si jamais Coquard venait à être battu. « On ne sait toujours pas vraiment à l’avance comment manœuvrer, mais cela fait partie de la course. » Si le vice champion olympique de l’omnium aux Jeux de Londres part fréquemment avec l’étiquette du favori sur les semi-classiques du calendrier, ses propos témoignent de l’homogénéité de la hiérarchie présente au départ. Des courses de plus en plus débridées, et un trophée de plus en plus difficile à aller chercher. Mais à l’heure où trois manches se succèdent en une semaine, la conquête de ce titre est loin d’être un leitmotiv pour le tricolore. « Le classement de la Coupe de France ? Je n’y pense pas vraiment. J’y ai un peu réfléchi à la fin de l’année passée, où j’ai terminé deuxième. Là, je suis un peu dans la même configuration qu’il y a un an, mais il ne faut pas s’obstiner avec ça. » D’autant que même si les espoirs du staff reposent en grande partie sur les résultats de Coquard, l’ancien pensionnaire du Vendée U compte bien exploiter la force collective, et insiste sur le fait que ces courses représentent des objectifs indirects pour lui, correspondant davantage à des étapes de sa préparation. « On a des bonnes forces en présence, Angelo Tulik vient de faire deuxième de la dernière étape du Circuit de la Sarthe, on est tous sur une bonne dynamique. »

« Engranger de la confiance »

Une dynamique collective récurrente des petits hommes verts, toujours performants pendant le mois d’avril. Onzième du Tour des Flandres, Vincent Jérôme s’est illustré de belle manière, tout comme Kévin Réza sur le Tour du Pays basque, alors que Thomas Voeckler est attendu pour la Doyenne, avant de céder le leadership à Pierre Rolland, qui disputera son premier Tour d’Italie. Et Bryan Coquard dans tout cela ? « Je suis avant tout là pour engranger de la confiance, et préparer au mieux l’Amstel Gold Race et la Flèche wallonne. » Grand bénéficiaire de la semi-révolution du tracé de la classique néerlandaise, le récent vainqueur de la Route Adélie a hâte d’en découdre, et de tirer son épingle du jeu en opportuniste. Surtout quand on sait que le faux-plat descendant favorise un regroupement si la différence ne s’est pas faite auparavant. Alors à l’heure où brillent les rois de la polyvalence comme Kristoff et Degenkolb, pourquoi ne pas voir Bryan Coquard créer la surprise à Valkenburg ? « Je n’y vais pas pour la gagne, mais c’est un très bon test », nous interrompait-il. Celui qui n’a pas réussi à trouver l’ouverture sur Paris-Nice n’en reste pas moins très inspiré. « Valkenburg, c’est là que j’ai décroché ma médaille d’argent aux championnats du monde U23 en 2012, et c’est sur que cela m’inspire vraiment, c’est une formule plaisante, une belle classique pour moi. » Dauphin de Lutsenko au terme d’un sprint d’une cinquantaine d’unités, le même scénario serait une bénédiction pour un Coquard conscient de pouvoir réaliser un coup sur une Amstel qui paraît des plus indécises, tant personne ne se dégage franchement du lot. « J’avais bien marché sur ces mêmes terrains, comme à Denain qui a lieu jeudi, en 2013. Alors j’espère pouvoir être au top de ma forme. Mais pour faire un coup, il ne faut avoir aucun pépin, et être à 100% »

D’où l’importance d’avoir un important capital confiance dans les jambes et de garder les pierres fondatrices de ses précédents succès. Cela passe par une assurance confortée par l’intermédiaire d’un sprint victorieux à Vimoutiers, mais aussi par une fraîcheur physique en dépit des nombreuses répétitions. « Il est vrai que j’arrive désormais à la fin de mon premier cycle, et j’ai eu un petit coup de moins bien en Sarthe, j’espère que cela ne se reproduira pas. » Un cycle débuté sur les routes du GP la Marseillaise, et qui devrait se conclure en haut du Mur de Huy. « Dans tout les cas, je ferai une coupure après l’arrivée à Huy, et je reprendrais bien tranquillement sur le Tour de Picardie. » S’il y a quelques changements par rapport à 2013, le vainqueur de la Classique de l’Indre 2013 reviendra sur des lieux qui lui ont souri. Rappelons qu’à la même époque, il y a un an, le bolide de la formation Europcar avait fait la nique à un Kittel en pleine préparation pour la Grande Boucle. Un Tour de France, justement, qui est déjà bien inscrit dans la tête de Bryan Coquard comme le clou de l’aventure saisonnière. « Le Tour de Picardie ? C’est justement la course sans pression par excellence. J’y ferai ma reprise avant de me projeter d’une manière sérieuse sur l’objectif primordial de l’année 2014 pour moi et Europcar, le Tour de France. » En effet, avec neuf étapes pouvant à priori faire le bonheur des habitués de la dernière ligne droite, ses performances seront attendues à juste titre après des débuts en boulet de canon. Car les promesses entrevues dans les résultats de Coquard ont de quoi faire saliver le public à l’avance. En attendant, l’Amstel dominicale offrira déjà une indication sérieuse sur son aptitude à franchir un nouveau palier.

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