Habituée à gagner sur les courses les plus prestigieuses du calendrier, l’équipe Katusha a certes mis la main sur de grandes épreuves en 2014, mais pas là où on l’attendait. Il y a bien l’éclosion au très haut niveau d’Alexander Kristoff, mais sur les courses par étapes, la formation russe n’a pas été aussi prolifique qu’attendue. Victime des pépins de sa paire espagnole Rodriguez-Moreno, qui touche sans doute à ses limites, une réorganisation de l’effectif paraît incontournable.

Trois raisons d’être satisfaits

Kristoff le Viking. Le cyclisme norvégien est en pleine mutation. Longtemps porté par le désormais retraité Thor Hushovd, l’émergence de grands talents comme Boasson Hagen, Nordhaug puis Kristoff, a mis dans la lumière un vivier nordique en pleine expansion. Et le dernier cité, longtemps sous-estimé chez BMC, a vraisemblablement trouvé son bonheur chez Katusha. Le voilà dans ses meilleures années à 27 ans, médaillé de bronze aux Olympiades londoniennes et désormais vainqueur d’un Monument. Triomphant à Sanremo sous une pluie battante, il a réglé Fabian Cancellara au terme d’un sprint de forçats. Sprinteur de classiques par excellence, il a fait preuve d’une épatante régularité en se classant cinquième du Tour des Flandres, avant de remporter le GP de Francfort, le Tour des Fjords, la Vatenfall d’Hambourg, et de terminer en loup chassé dans les tops 10 de la classique de Plouay et des Mondiaux de Ponferrada. Capable de briller sur des courses par étapes parfois sélectives, il a passé avec succès la case Tour de France, décrochant deux bouquets à Saint-Étienne et à Nîmes, puis concurrençant Kittel sur les Champs. Troisième meilleur scoreur de la saison derrière Démare et Greipel, il s’est affirmé comme un monstre physique, postulant encore à un plus grand répertoire. Plus de la moitié des succès de l’équipe lui reviennent…

L’alternative Simon Spilak. Le Slovène à désormais fait son trou dans le gratin World Tour, au point d’être reconnu comme un vrai spécialiste des épreuves d’une semaine. Comme à son habitude, c’est au printemps que l’ancien coureur de Lampre a brillé, terminant huitième de Paris-Nice et quatrième du Tour du Pays-Basque avant d’éblouir de son talent sa course fétiche qu’est le Tour de Romandie. Comme l’an passé, il s’est payé le luxe de devancer Chris Froome au terme de l’étape reine, même si le Britannique fut logiquement dominateur dans le chrono final. Victorieux à trois reprises en 2014, avec un beau numéro solitaire sur le Dauphiné ainsi que l’étape reine de l’Artic Race of Norway, il s’est cependant complètement effacé durant un Tour de France qui devait le voir leader. Abandonnant même après avoir manifesté son drôle de caractère, les grands tours ne semblent toujours pas faire partie de son panel d’action.

La renaissance de Giampaolo Caruso. Tout comme son compatriote Paolini il y a deux années de cela, Caruso s’est retrouvé une deuxième jeunesse après un long passage à l’ombre dans le rôle du gregario modèle. Profitant des évènements malencontreux ayant touché ses leaders, il s’est mis en valeur sur la “Doyenne”, conclue à une quatrième place qui pourra lui faire nourrir quelques regrets. Sorti dans la montée finale d’Ans, il aura fait partie des rares attaquants du jour. Mais tout est bien qui finit bien, puisque le quatrième d’un Tour de Lombardie a renoué avec la victoire sur ses terres, lors de la classique Milan-Turin. De quoi espérer obtenir un peu plus de libertés de la part de ses dirigeants l’an prochain.

Trois raisons d’être déçus

La gestion de la saison de Joaquim Rodriguez. “Purito” n’a plus ses jambes de vingt ans, et ne peut vraisemblablement plus s’attaquer à tous les terrains. En ciblant le Giro et la Vuelta, le choix de vouloir rééditer – en mieux – la saison 2012 conclue par deux places de dauphins était sans doute osé. Sauf que si l’on excepte un Tour de Catalogne savamment géré, Joaquim Rodriguez a connu de nombreuses déceptions. D’abord l’abandon à Montecassino sur le Tour d’Italie, où il n’avait pas fait bonne impression depuis le départ irlandais, puis un retour à la compétition hasardeux sur le Tour de France. Une préparation sans doute optimale pour la Vuelta qui lui tenait à cœur, mais de l’énergie sans doute gaspillée à vouloir obtenir un maillot à pois rapidement devenu illusoire compte tenu de son état de forme. Troisième à San Sebastian, au pied du podium à Madrid, huitième sans éclat au Tour de Lombardie, il n’a pas trouvé l’ouverture en deuxième partie de saison, ce qui conduit à voir son total de points UCI divisé par trois. L’ex-numéro un mondial ne peut plus nier qu’il a perdu de nombreuses opportunités ces dernières années, qui ne se représenteront plus…

Un Luca Paolini transparent. L’expérimenté classicman transalpin est resté très peu en vue tout au long de la saison 2014, si ce n’est pour faire la Une des sites internet durant le Tour, pris la main dans le sac utilisant son smartphone dans le peloton. Meneur des grévistes de la patinoire de Bari sur le Giro avec sa barbe hirsute, son bilan sportif se limite à une treizième place obtenue au GP E3. Bien que lieutenant d’Alexander Kristoff sur la Primavera ou encore tout au long du Tour de France, il n’a jamais réussi à s’illustrer dans ses domaines de prédilection, et termine l’année sans victoire. Âgé de 37 ans, il paraît difficile de le voir revenir en haut de l’affiche.

Le peu de soutien accordé à Kristoff. Avoir une pointure mondiale dans ses rangs fait partie des privilèges dont bénéficie l’équipe Katusha, et pourtant, on peut dire qu’il n’est pas vraiment exploité à son maximum. Si le Nordique sait admirablement bien se débrouiller quand il est esseulé, et arrive à gagner sans train, l’apport d’un dispositif bien organisé dans les derniers mètres ne lui serait pas de trop. Les poissons-pilotes désignés, comme Tsatevich, Selig ou Haller, ne franchissent pas le cap espéré, hormis de manière relative pour le Russe. Du coup, c’est à Paolini de faire le métier quand les jambes tournent bien. Bien regrettable donc, puisque la moisson pourrait être encore plus conséquente avec un vrai train ! Et ce n’est pas l’arrivée du seul Jacopo Guarnieri qui changera la donne.

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