À l’approche des championnats du monde de Ponferrada, Alexandr Kolobnev fait figure de taulier. Souvent présent, souvent placé, jamais gagnant, le puncheur russe revient sur ses objectifs, ceux de la sélection, et la place du cyclisme dans son pays. Ponferrada peut-il enfin lui sourire ? Il répond à toutes les interrogations et apporte un point de vue éclairé aux micros de la Chronique du Vélo !

“J’ai toujours songé à la victoire”

Alexandr Kolobnev fait désormais office d’habitué des Championnats du Monde. Âgé de 33 ans, le meilleur coureur russe de classiques de ces dernières saisons a tutoyé les sommets en arrivant au paroxysme de sa maturité physique. Deuxième d’un Liège-Bastogne-Liège et troisième d’un Tour de Lombardie, aurait-il déjà laissé passé sa chance sur un Monument ? L’un des fers de lance nationaux de l’équipe Katusha ne s’est au contraire pas vraiment découragé, même après des moments diffficiles, comme sa courte suspension après un contrôle positif lors du Tour de France 2011. Alors, au moment de disputer ses douzièmes Mondiaux, sa motivation est toujours intacte. “Rien n’est impossible, alors pourquoi pas ? Plus sérieusement, à chaque fois que je me suis présenté au départ des Championnats du Monde, j’ai toujours songé à la victoire et tenté de donner le meilleur de moi-même. J’ai souvent été proche par le passé d’une grande performance. J’espère que cette année encore, j’aurai une chance d’aller chercher la victoire !” Malgré un parcours sans doute moins difficile que celui de Mendrisio en 2009, où il avait pris la deuxième place, comme à Stuttgart en 2007, le double champion de Russie ne désespère pas de convertir ses multiples podiums et places d’honneur en une victoire, la plus belle pour un coureur cycliste. “Il s’agit sans aucun doute de la course la plus difficile de la saison et du calendrier professionnel. Tous les meilleurs coureurs du monde seront présents, et ce sera sûrement une grande course, dure au niveau du parcours et avec une grande bataille parmi les favoris. Je suis préparé pour ces moments, et ce malgré les douleurs dues à cette blessure…”

Cette blessure à l’épaule date d’il y a quelques semaines, occasionnée suite à cette chute impressionnante sur la Vuelta, dans la descente du Puerto del Torno, lors de la quinzième étape. Mais elle n’a pas changé les ambitions du Russe, qui avait défini son programme avant le grand départ de Jérez. Son bilan 2014 est pour le moment encourageant, avec une condition qui monte crescendo, en témoignent quelques places d’honneur sur des étapes de la Vuelta. “En réalité, je ressens encore quelques séquelles de ma chute en Espagne. Ce n’est jamais facile de faire avec et de surmonter ces obstacles. Mais tout de même, je pense que je suis en bonne forme, et je me sens vraiment prêt pour dimanche. Ma condition est optimale. Nous avons encore un peu de temps avant le grand départ, et pour le moment, tout est ok. Je n’ai plus qu’à voir ce que cela va donner !” Depuis son come-back effectué en 2012, le natif de Vyksa est toujours capable de coups d’éclats, comme une troisième place sur le Grand Prix de Montréal, ou des attaques dignes du bon vieux temps sur la Clasica San Sebastian, qui lui a toujours échappée. Si l’on annonce un possible sprint en petit comité pour la gagne, lui ne veut pas en entendre parler, et compte faire honneur à son tempérament. “Depuis mes débuts chez les professionnels, j’ai retrouvé mes valeurs dans le cyclisme offensif. Il y a beaucoup de facteurs physiques, psychologiques qui m’ont fait arriver jusqu’à là. J’aime attaquer, être agressif sur le vélo, provoquer et défier mes adversaires. C’est de cette manière que je veux encore aller chercher des succès. ”

“La sélection russe est forte”

Toutefois, même si les plus grands champions ont bien souvent dû faire sans un support démentiel à leurs côtés, Kolobnev, lui, nourrit de grands espoirs sur le comportement de sa nation, au cœur d’un projet cycliste symbolisé par l’émergence au plus haut niveau des équipes Katusha et Rusvelo. “L’équipe de Russie devra tenter quelque chose dans le final, maintenir la meilleure stratégie possible tout au long du Mondial, courir à l’avant naturellement. Nous en avons les capacités, et dans le dernier tour, chacun devra se battre comme il le pourra.” Accompagné du fidèle Yuri Trofimov, mais aussi des prometteurs Sergeï Chernetskiy, Roman Maikin, Ilnur Zakarin et Andreï Solomennikov, l’objectif global ne sera pas de calculer mais plutôt de rouler à l’instinct. “Au départ de chaque course, je viens pour décrocher le meilleur résultat possible. Ici, nous venons pour faire un résultat, cela va de soi, mais il est impossible de prédire à l’avance ce que nous pouvons viser de manière mathématique ou théorique. C’est aléatoire, et on peut très bien se retrouver dans la lutte pour la gagne comme dans une autre avec à la clé un accessit.” Et on le comprend, sur un circuit pouvant sacrer une quarantaine de coureurs différents sur un scénario particulier. Il n’empêche qu’on homme fort pourrait parvenir à s’isoler. Alexandr Kolobnev n’a donc rien à perdre, et fait le déplacement en Espagne sans pression, de quoi le conforter dans sa carrure nouvelle.

Exit l’ère du tsar Menchov au pays, c’est surtut aux vieux briscards de la décennie 2000 de prendre le relais et de guider la nouvelle génération, capable du pire comme du meilleur. “C’est vraiment important et plaisant de partager, transmettre son expérience, son vécu aux jeunes talents qui regorgent. Pourtant, même si je constate que c’est parfois compliqué de se faire écouter vis-à-vis de certains, j’estime que j’ai des bonnes relations avec les jeunes espoirs que je côtoie. Si ces derniers veulent me poser des questions, même en pleine course, pour leur ravitaillement, la gestion de leur corps au niveau de l’effort, je m’efforce toujours de leur venir en aide. De même au niveau de l’entraînement hors compétition.” Une maîtrise parfaite de soi qui est indispensable lors d’épreuves telles qu’un championnat du monde, ou une classique historique, lorsque la distance dépasse allègrement les 250 kilomètres… “Il ne nous manque que des médailles”, souligne malgré tout un Kolobnev plein de lucidité. Ce week-end, il pourrait réparer l’anomalie, après avoir si souvent espéré que cela arrive. “Je suis sûr que cela sera une grande fête dans mon pays si cela se produit !” Le rêve est en tout cas permis…

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