Quand la saison sur route reprend ses droits, celle de cyclo-cross, elle, se termine. Ce week-end, Mathieu Van der Poel sera donc le grandissime favori des Mondiaux, l’un des derniers grands rendez-vous de la saison des labourés. Et si à propos de lui, tout ou presque a déjà été dit, c’est l’occasion de revenir sur son père, Adrie, sacré champion du monde il y a 22 ans.
Hommes de classiques…
Au petit jeu des anecdotes concernant Mathieu Van der Poel, son lien de parenté avec Raymond Poulidor – son grand-père – revient inlassablement. Mais dans l’esprit des passionnés de cyclisme, le nom « Van der Poel » résonne comme celui de l’un des meilleurs coureurs de classiques de la fin du siècle dernier. Il s’agissait d’Adrie, qui fut également un véritable spécialiste du cyclo-cross au palmarès éloquent, mais garni d’un seul titre mondial. Une quête parfois tortueuse, mais récompensée en 1996.
Plongeons dans les souvenirs, et dans ce cyclisme qui fleure bon le vintage, avec les manettes de dérailleur au cadre, les casques à boudins et les résumés de courses bricolés dans Stade 2 le dimanche soir. Et ce nom qui résonne so Flahute, en trois syllabes, claquant comme un coup de bordure entre deux bergs. « Van Der Poel », où l’évocation de cyclisme à mi-chemin entre les glorieuses envolées de Merckx et De Vlaeminck, et l’époque des légendes Johann Museeuw, Andrei Tchmil ou Franco Ballerini. Entré en carrière en 1981 sur la route, le natif d’Hoorgheide place la barre très haut dès sa première saison sous les couleurs de DAF Trucks. Au côté de Roger de Vlaeminck ou Hennie Kuiper, il s’illustre dès Paris-Nice. Il poursuit sur la Flèche Wallonne, deuxième, puis remporte une étape du Dauphiné. Le jeune néerlandais impressionne. Et laisse entrevoir un potentiel incroyable.
Les courses d’un jour deviennent alors son terrain de jeu. Et peu importe le lieu et le profil, puisque la terreur batave se révèle à l’aise partout. Aussi bien sur les pavés et dans la boue des Flandres que dans les montées sèches de la Wallonie ou de la Lombardie. En vingt années de carrière, de 1981 à 2000, il garnit son palmarès de quelques grandes classiques et de beaucoup d’accessits. Il décroche deux monuments : le Tour des Flandres en 1986 et Liège Bastogne Liège en 1988, auxquels il faut y ajouter une Amstel Gold Race, une Classica San Sebastian ou encore un Grand Prix de Zurich. Et tant pis si le garçon est moins prolifique sur les grands tours, il s’impose comme l’une des plus grosses machines du printemps.
… mais aussi maître des labourés
Exceptionnel de régularité toute la saison, Adrie Van der Poel n’est pour autant pas du genre à débrancher l’hiver venu, devenant rapidement l’un des cadors mondiaux du cyclo-cross. Prophète en son pays, il décrochera six titres nationaux, dont quatre consécutifs, entre 1988 et 1999. En seize participations, il ne ratera qu’une seule fois le podium de son championnat national. Au niveau mondial, c’est toutefois un peu plus compliqué. Une relation d’amour-haine le lie aux championnats du monde. Toujours placé, mais jamais gagnant, il décroche cinq médailles d’argent, dont quatre consécutives de 1988 à 1991. Une malédiction. Jouant sur sa relation maritale avec la fille de Raymond Poulidor, certains journalistes lui affublent alors le surnom de « Van Der Poelidor ». Il faudra attendre 1996 pour enfin faire taire les critiques.
Sur la fin de carrière, à bientôt 36 ans, « VDP » se présente avec son éternel statut d’outsider du côté de Montreuil, en région parisienne. C’est sa dixième participation ai Mondial. Avec le plein de confiance, puisque vainqueur de la manche française de la Coupe du Monde, à Pontchâteau. Les Italiens Bramati et Pontoni sont annoncés favoris, et les Français attendus car à domicile. Sur un circuit resté au sec et très roulant, l’allure est hyper rapide. Dans le dernier tour, Van der Poel s’isole avec Bramati et ne lui laisse aucun relais. Dans les derniers mètres, sa pointe de vitesse lui permet de devancer un un Pontoni revenu du diable vauvert et un Bramati au bout du rouleau. C’est enfin la consécration pour le Néerlandais, qui signe son dernier grand fait d’armes en carrière, quatre ans avant sa retraite. Un titre mondial glorieux, savouré comme il se doit, entouré de deux petits bonhommes, biberonnés aux exploits de Papa : David, trois ans, et Mathieu, un an. Mais ça, c’est le début d’une autre histoire.